La Guerre 1914-1918 est bien connue des chercheurs mais… Ne recherchons-nous que les Morts pour la France ? Pensons-nous à ceux qui sont partis et revenus ? Quand parle-t-on de ceux-là ? Jamais !
Il y a aussi ceux, 95 000 d’après le site Mémoire des Hommes, qui sont partis à la Guerre, qui sont morts et qui sont tombés dans l’oubli. Alphonse Paul DEŸ est de ceux-là !

Alphonse Paul DEŸ naît, à Melun (77), le mardi 17 janvier 1871 dans le foyer d’Alphonse, 31 ans, employé au chemin de fer, et Marie Anastasie REDDÉ, 28 ans, sans profession.
Il est le second fils du couple, Gabriel Désiré, l’aîné est né le 16 septembre 1868 à Melun (77).
La famille vient s’installer à Moissy-Cramayel (77), entre 1875 et 1877 ; elle s’est agrandie avec :
- Albert Gaston, né le 8 septembre 1874 à Melun (77),
- Alphonse, né le 6 novembre 1875 à Meaux (77),
- Louis Octavien, né le 25 août 1877 à Moissy-Cramayel (77).
Alphonse Paul connaît la première perte d’un proche par le décès de son petit frère Louis Octavien, le samedi 22 septembre 1877.

En 1886, lors du recensement, la famille s’est encore agrandie :
- Honoré Bertin, né le 22 février 1879,
- Henri Fortuné, né en 1882,
- Marie Nydia, née le 1er mars 1885.
En 1888, Gabriel Désiré, l’aîné des garçons, est exempté du service militaire pour « myopie ». Et puis Alphonse Paul est appelé à son tour avec la classe 1891. Il est décrit les cheveux bruns, les yeux châtains et mesurant 1,57 m. Il a une bonne instruction, degré n° 3, il sait lire et écrire et exerce la profession de garçon boucher chez M. SAUNIER.
Alphonse Paul DEY, de petite taille, est incorporé dans un régiment d’infanterie : le 17ème Bataillon de Chasseurs à pied, régiment qu’il rejoint le 16. Promu chasseur de 1ère classe, il suit les cours de l’Ecole normal de Gymnastique et d’Escrime du 1er août 1893 au 15 janvier 1895. Promu sergent, il est envoyé en congé le 24 septembre 1895 avec le certificat de bonne conduite.
Le 18 avril 1896, à Moissy-Cramayel, il épouse Victorine Marie GUILLERME, 22 ans, couturière, fille de Victor et Rosalie Adélaïde PHILIPPEAU.
Du 5 février 1901 au 5 avril 1911, homme d’équipe aux Chemins de fer de ceinture au Bourget, il démissionne pour partir en Afrique, toujours dans les chemins de fer. Il est chef de gare à Bohicon, au Dahomey (aujourd’hui le Bénin).

La Première Guerre Mondiale éclate, l’Ordre de Mobilisation générale rappelle tous les hommes encore sous le couvert de la conscription. Alphonse Paul quitte donc l’Afrique pour être affecté au 35ème Régiment territorial d’Infanterie le 7 avril 1915. Il est déjà âgé de 44 ans. Le 1er avril 1917, il passe au 8ème Régiment d’Infanterie et décède à Proyart, dans la Somme, le 10 décembre de la même année.
Sa fiche matricule indique qu’il est mort « accidentellement » dans le marais de Proyart, mais l’armée, après enquête de gendarmerie, a décidé que cette mort était volontaire. Il ne peut avoir droit à la reconnaissance de la patrie !
Le corps est rendu à son épouse et l’état accorde un secours de 200 francs.
L’Etat français ne reconnaît peut-être pas la bravoure d’Alphonse Paul DEŸ mais les membres du Conseil municipal, eux, ont jugé, à juste titre, qu’il était Mort pour la France pendant le conflit, peu importe les conditions du décès. C’est ainsi qu’il est inscrit sur le Monument aux Morts de la commune.
En avril 2014, une première demande de recours auprès de la Direction des Missions – Département des Réparations, a reçu un refus de l’ONAC clair et net d’attribuer la mention Mort pour la France.
En octobre 2014, une autre demande est formulée auprès du Ministre de la Défense, Jean-Yves LE DRIAN qui renvoie le dossier à l’ONAC… qui refuse à nouveau.
En 2015, M. Olivier FAURE, député de la 11ème Circonscription de la Seine-et-Marne, intervient auprès du même ministre, mais… rien n’y fait, c’est encore un refus.
Il faudrait pouvoir consulter le procès-verbal de la gendarmerie de l'époque afin de connaître le motif exact retenu de ce décès "accidentel" ! Comment penser que, revenu du Dahomey pour combattre l'ennemi, Alphonse ait pu faire marche arrière et fuir ?
Source :
– AD77 – 5MI6058 – Etat civil de Melun – année 1871
– AD77 – Recensement de population – Moissy-Cramayel – 1886
Cet article a été publié la première fois le 4 juin 2016 sur le blog Antequam de Canalblog.