Les jeunes et l'amour… Aimer certes, mais de là à entrer dans la chambre d'une jeune fille sans son consentement !...
Le Matin, dans son édition du 13 novembre 1925, relate un fait divers ayant eu lieu à Lyon. Quels sont les principaux intéressés ?
Marcelle Jeanne Denise GILLET, née le 30 décembre 1906, à Lyon est l’aînée, et surtout la seule fille, de Marie Joseph Charles, industriel dans les textiles – soyeux ou teinturier, et Juliette Henriette Marcelle GARIN. Elle est amie avec Marie Antoinette Julie Camille SEUX, née en 1895 à Lyon.
Louis Jules SEUX, né le 1er janvier 1897, à Lyon, fils de Joseph Jules Baptiste, industriel aussi dans les textiles, et Antoinette Marie BIGOT. Il est le frère de Marie Antoinette Julie Camille.
LES FAITS
Louis, le 29 octobre 1925, adresse un courrier à Charles GILLET en lui demandant un rendez-vous « pour affaire ». Ce dernier tente une réponse téléphonique : il est en relation depuis de longues années avec la maison Charrel et Seux, de Villeurbanne, dont l’un des chefs est M. SEUX, père. A son appel, il lui est répondu que Louis ne fait plus partie de la maison. Il répond donc par écrit en proposant un rendez-vous entre 6 et 7 heures du soir, le jour à la convenance de Louis.
Louis se présente donc à Charles GILLET le 31 octobre. Là, tout de go Louis demande la main de Denise. A la demande de comment ils se connaissaient, Louis répondit qu’il l’avait rencontrée par deux fois chez des amis communs, MM. BERRIER et MILLET et que sa sœur est une de ses amies.
Charles, en bon père de famille, juge que ce n’est pas suffisant, que sa fille est encore trop jeune, qu’elle va à l’école et que, donc, il faut attendre encore. Pourtant, Louis est certain de vouloir épouser Denise ! Il avait même demander à son père de faire officiellement la demande, demande aussi refusée. Depuis, il avait passé 4 mois en Angleterre et tout le monde pensait que son envie de mariage était passée.
Tant est si bien que Charles GILLET ne s’attendait pas du tout à la visite, surprenante de Louis dans la chambre de sa fille, en ce 12 novembre 1925, et encore moins des conséquences qui en ont découlée : Louis, élégamment vêtu et chaussé de souliers vernis, est à l’hôpital, très grièvement blessé.
Une enquête est ouverte !
Interrogé par M. JOURDAIN, juge d’instruction, il explique s’être introduit dans la villa : « C’est sans la moindre complicité de Mlle Denise Gillet que j’ai pénétrait dans sa chambre. Elle dormait. Je l’ai embrassée doucement sans la réveiller. Et c’est alors que je m’éloignais que j’ai été sauvagement assailli et frappé« . L’assaillant est le père de la demoiselle, Charles GILLET, qui est, étonnament en voyage en Allemagne…
Mais c’est le jardinier, Eugène GOBERT, qui a blessé, grièvement d’une balle dans la tête, le malheureux amoureux éconduit. L’employé aurait agi à la demande de Mme GILLET, mère.
Louis SEUX est transporté à l’Hôpital. Le professeur Etienne MARTIN, médecin légiste, donne son rapport au juge d’instruction le 29 décembre 1925. Ayant reçu des plombs dans le cerveau, il résulte de son état une aphasie quasi complète et une hémiplégie du côté droit. Louis ne peut toujours pas être de nouveau interrogé.
Le Professeur MARTIN, dans son rapport, précise que Louis qu’il a perdu totalement la parole : il n’a donc plus la possibilité d’être entendu et de se défendre.
GABERT, le jardinier, qui doit comparaître devant la justice est prêt à maintenir ses aveux, mais il a été menaçant en disant « Si je suis coincé, je parlerai ! » La famille GILLET est inquiète car l’ordre de tirer a bien été donné par Mme GILLET.
En février 1926, le Bureau de la Fédération du Rhône de la Ligue des Droits de l’Homme écrit au Ministre de la Justice en contestant l’attitude du juge d’instruction qui a, d’office, inculpé Louis SEUX, alors même qu’il avait été lui-même victime d’un crime qui ne justifiait pas de la légitime défense.
L’enquête dure, dure, jusqu’au mariage de Denise, le 13 janvier 1931 avec François BROSSETTE, et le décès de Louis, à la clinique au 229 cours Gambetta, le 4 avril de la même année…
La famille GILLET reste au complet avec ses cinq enfants, la famille SEUX qui a déjà perdu un fils lors de la Première Guerre Mondiale, n'a plus que sa fille…
Source
– RetroNews – Le Matin – édition du 13 novembre 1925
– RetroNews – L’Humanité – édition du 30 décembre 1925
– RetroNews – Les Cahiers des Droits de l’Homme – édition du 25 février 1926
– RetroNews – L’Intransigeant – édition du 30 janvier 1926
– Archives municipales de Lyon – Etat civil
– CHATGPT et ma collègue C. LUXEMBURGER : trouver la clinique 229 cours Gambetta