Méconnu voire inconnu aujourd'hui, Gabriel LEUVIELLE dit Max LINDER, a été LA vedette française du cinéma muet au début du vingtième siècle…
Gabriel LEUVILLE naît le 16 décembre 1883 à Saint-Loubès, en Gironde. Fils de Jean et Suzanne BARON, il est le troisième enfant d’une fratrie de quatre : Gabriel Maurice, né le 28 juin 1881, Gérard Laurent, né le 21 avril 1888 et Suzanne Marcelle, née le 8 juin 1890.
La famille de Gabriel est aisée, elle navigue souvent vers les Etats-Unis, où est d’ailleurs né Gérard Laurent. Au recensement de population de 1906, toute la famille vit dans le hameau de Cavernes, à Saint-Loubès.
Gabriel, déjà appelé Max dans la famille, suit les cours d’art dramatique au Conservatoire de Bordeaux mais est renvoyé dès la deuxième année à cause d’un désaccord avec un professeur. Rien ne l’arrête, il continuer de jouer sous le nom de Max Lacerda
En 1904, il est appelé au recensement militaire. Gabriel est décrit les cheveux et les yeux châtains, et mesurant 1,62 m. Exempté, il change de nom choisissant Max LINDER au hasard d’une promenade dans les rues de Bordeaux et décide de monter à Paris.
Il y rejoint un ancien professeur du Conservatoire et joue aux Théâtre des Variétés puis, il est engagé par la maison Pathé pour « faire du cinéma ». C’est le début du prolifique carrière…
En 1908, Les premiers problèmes de santé touchent Gabriel qui rentre dans sa famille à Saint-Loubès. Dans son numéro du 20 septembre 1908, la Comoedia annonce que l’artiste va mieux. Les tournages cinématographiques reprennent…
En 1911, à la suite d’un saut acrobatique en patins à roulettes, l’acteur est obligé de s’arrêter quelques mois mais revient dès 1912 pour une tournée en Espagne puis en Allemagne.
La Guerre de 1914 arrête sa carrière, lorsque le 17 septembre, Gabriel, toujours exempté, s’engage volontairement pour la durée de la Guerre à la mairie de Paris 17ème, au titre du 19ème Escadron du Train des Equipages militaires et passe au 15ème Régiment d’Artillerie le 18 septembre suivant. Mais sa santé n’étant pas très bonne, il est classé « service auxiliaire » par la Commission de Réforme de la Seine, le 5 décembre 1914. Son état de santé générale s’aggrave, problèmes de paroi abdominale et bacillose pulmonaire : la Commission Spéciale de la Seine le réforme le 28 avril 1915.
L’armée le renvoie définitivement dans ses foyers.
Gabriel, Max LINDER, reprend ses activités cinématographiques où il excelle, malgré de gros soucis de santé. Un séjour dans un sanatorium aux Etats-Unis en 1916, un autre séjour à Lausanne en 1920, ne guérissent pas son problème respiratoire, encore moins celui psychologique. Gabriel pense déjà au suicide…
De repos à Chamonix, en 1921, il fait la rencontre de Jeanne Hélène PETERS. Il est âgé de 38 ans, elle n’en a que 17 ! Il n’a qu’une idée en tête : l’épouser ! Malgré l’opposition de la mère, Gabriel et Jeanne se marient le 1er août 1923 à la mairie du 16ème arrondissement. Le mariage a eu lieu dans la plus stricte intimité.
Dans son édition eu 3 août 1923, le journal Comoedia raconte « Depuis quelques jours, le bruit – faible : un souffle, un rien ! – du mariage de Max Linder courait…, sans, d’ailleurs, que personne ne soit capable de l’attraper, d’une façons assez effective, pour qu’il puisse être pris au sérieux. D’aucun, souriant, disaient que ce devait être, tout simplement, les prodromes d’une publicité – à l’américaine – relative à un film que pourrait tourner le spirituel artiste.«
Torturé, malade, jaloux à l’extrême, les relations maritales se dégradent très vite. Même la naissance de leur fille, Maud Lydie Marcelle, le 27 juin 1924, à la maternité de Montmorency, ses parents résidant 11 bis, avenue Emile Deschanel, à côté de la Tour Eiffel. Les parents ne sont pas d’accord sur les prénoms à donner, comme le tire le Comœdia dans son édition du 29 juin !
Les rumeurs commencent à se propager sur le fait que Jeanne Hélène demanderait le divorce. C’est impossible pour Gabriel, il ne trouve qu’une seule solution à son problème…
Dans son édition du 1er novembre 1925, le journal Le Matin raconte :
« Max Linder, maître d’une grosse fortune, arrivé au summum de la célébrité, donnait depuis un certain temps des signes de neurasthénie qui n’étaient pas sans inquiéter ses amis. Déjà, en 1924, à Vienne, il avait essayé de se suicider. Se sentant fatigué, l’artiste avait démissionné, il y a trois jours, de la Société des auteurs de films dont il était le président. Un ami lui avait offert avant-hier de l’emmener dans sa propriété à la campagne.«
Mais Gabriel LEUVIELLE, dit Max LINDER, en a décidé tout autrement. Alors que le couple occupait un appartement à l’hôtel le Baltimore, avenue Kléber, il a décidé d’en finir, mais pas seul. Menaçant son épouse d’une arme, il oblige cette dernière à avaler, comme lui, du véronal et des piqûres de morphine. Ensuite, il ouvre les veines de son épouse, puis les siennes.
L’alerte est donnée par Mme Mathilde PETERS, venue pour dire au revoir à sa fille. « Les deux victime sont transportées à la clinique de la rue Piccini« . Jeanne Hélène décède le 31 octobre 1925, à 18 heures et son époux, Gabriel, le 1er novembre à 0h30.
Les deux décès sont déclarés à la mairie du 16ème, le 4 novembre. A noter que Gabriel Maurice ne déclare que le décès de son frère laissant l’administration le soin de déclarer celui de sa belle-sœur…
Cette tragédie va bouleverser la vie de la petite Maud tiraillée en justice par les deux testaments de ses parents. Ces derniers se contredisent : l'un désire que sa fille soit élevée par son frère, Gabriel Maurice, l'autre demande que ce soit sa mère, Mathilde PETERS, qui s'en occupe…
Sources
– BnF Gallica – Le journal « Le Matin » – Edition n° 15201 – 1er novembre 1925
– RetroNews – Le journal « Comœdia »
– Edition du 20 septembre 1908
– Edition du 3 août 1923
– Edition du 29 juin 1924
– Wikipédia – Max Linder
Article très intéressant qui nous remémore qui était Max Linder ! Merci pour ces belles recherches et cet article qui augure de prochaines lectures passionnantes.
Merci à vous ! Lorsque les lecteurs sont satisfaits de mes publications, cela me donne encore plus l’envie d’écrire… A demain ?