En 1836, le vengeur axonais a pour mission de montrer son pavillon dans les eaux françaises et alliées et à garantir la sécurité des routes commerciales. Il peut chasser les corsaires, lutter contre la piraterie et protéger les convois marchands.

A la suite de plusieurs signalements de corsaires tunisiens et de contrebandiers espagnols entre Bône et La Calle, le Vengeur axonais reçoit l’ordre de quitter Toulon le 26 avril 1836 pour assurer une patrouille de huit semaines en Méditerranée.
Le bâtiment part accompagné de la goélette l’Espérance joliette, avec pour instructions de :
– reconnaître les criques et les petites baies susceptibles d’abriter un ennemi,
– Escorter les navires marchands battant pavillon français,
– Rappeler, par sa seule présence, que la France veille sur sa jeune colonie algérienne.

Louis-Philippe de MONTFORT, capitaine de vaisseau, lève donc l’encre avec son équipages dont ses proches fidèles : le Père Fournaise, gabier, Louison, canonnière, l’Antillais, timonier, la Mouche, autre gabier, et Yves-Marie LE MOAL, le médecin de bord.
La patrouille est ainsi organisée :
– cap est-sud-est, en longeant la côte africaine,
– durée à 8 semaines,
– les vigies sont changées toutes les deux heures, 24 heures sur 24,
– les exercices de tir ont lieu tous les trois jours,
– la prière a lieu en commun le dimanche sur le pont principal,
– le contrôle de santé est effectué tous les matins à neuf heures.
Le Vengeur axonais emporte à son bord près de 740 hommes… Ils ont tous un passé et un présent personnels, parmi eux…
1. Louis-Philippe de MONTFORT, capitaine de vaisseau, 47 ans, natif de Saint-Malo, noblesse de vieille souche.
Né dans une famille d’armateurs malouins, Louis-Philippe est entré dans la marine à 15 ans, fasciné par les exploits de Surcouf et les récits d’exploration. Il a combattu lors de la guerre d’indépendance grecque et a servi à Toulon, Alger, et Smyrne. Capitaine austère mais juste, il incarne la tradition navale française. Toujours vêtu impeccablement, il se tient droit comme un mât, et cite souvent Fénelon ou Vauban. Il dort peu, veille sur son pont et observe les étoiles comme un prêtre lirait les Écritures.
2. Jean-Baptiste FOURNIER, le Père Fournaise, maître d’équipage, 50 ans, natif du Havre.
le Père Fournaise a servi sous trois rois et deux républiques. Ancien mousse devenu gabier, il a gravi tous les échelons grâce à sa force de caractère et une mémoire prodigieuse des vents, des voiles et des hommes.
Il parle peu mais juste, d’une voix grave comme un coup de canon par temps calme. C’est lui qui réprimande d’un regard, félicite d’un mot. Il est la colonne vertébrale du navire. On dit qu’il a failli mourir trois fois : noyé, pendu, puis blessé en duel. Il a survécu à tout, sauf à l’amour — il ne s’est jamais marié.
3. Louise CARPENTIER, Louison, canonnière, 31 ans, native de Dieppe
On la croit homme à son arrivée, fine, rapide et déterminée. Mais lors d’une attaque en mer d’Italie, blessée, on découvre sa véritable identité. Au lieu de la renvoyer, le capitaine, impressionné par sa bravoure, ferme les yeux. Depuis, Louison est respectée de tous. Elle connaît les canons comme d’autres connaissent leur chapelet. Elle chante parfois des complaintes normandes en nettoyant la batterie. C’est la seule femme à bord, mais personne n’ose la défier : elle a une précision de tir redoutable… et un coup de poing tout aussi efficace.
4. Séraphin BOUTIN, le Créole, timonier, 39 ans, natif de Fort-de-France
Petit-fils d’un marin guadeloupéen et d’une guérisseuse créole, Séraphin a appris la mer sur des yoles, à la voile carrée. Il a l’oreille fine, lit le vent au sifflement, le ciel à la couleur de l’horizon. À bord du Vengeur, il tient la barre comme un prêtre son ostensoir. Il chante des airs créoles pour rythmer les manœuvres et porte toujours une amulette faite de graines et de coquillages. Jamais pris en défaut, on dit qu’il a évité un écueil invisible par simple intuition. Un marin de foi… et de flair.
5. Etienne GAULTIER, le crabe, mousse et tambour, 12 ans, natif d’Alger, placé à l’orphelinat naval de la ville.
Fils d’un soldat disparu lors de la prise d’Alger en 1830, Étienne est recueilli par l’Aumônier Martel, puis embarqué comme mousse. Petit, rapide, curieux, il observe tout et rêve en silence. Il est devenu tambour par nécessité, mais c’est sa mémoire des rythmes et son énergie qui en ont fait un messager indispensable. Il dort dans les cordages, lit des bribes de journaux cachés et se fait raconter la mer par les anciens. Un jour, il jure qu’il sera officier. Personne ne le croit… sauf le capitaine Montfort, qui veille secrètement sur lui.
6. Yves-Marie LE MOAL, médecin-major, 38 ans, natif de Quimper.
Formé à Brest, Victor a servi dans les hôpitaux militaires d’Alger avant d’embarquer sur le Vengeur. Barbe taillée, regard sombre, il parle peu mais soigne vite. Il refuse les superstitions, mais conserve dans son coffre un ancien grimoire médical breton hérité de sa grand-mère. À bord, on l’appelle le « sorcier blanc ». Il utilise autant les scalpels que les cataplasmes d’algues, et cite parfois Hippocrate entre deux amputations. Il fume une pipe d’écume sculptée et tient un journal de bord médical où il note, outre les pathologies, les rêves de ses patients.
7. Augustin LEMOINE, Tic-Tac, enseigne de vaisseau, 22 ans, natif de Besançon.
Fils d’un horloger, Augustin a troqué les engrenages pour les astrolabes. Silencieux, minutieux, il passe ses nuits à tracer des cartes et lire les étoiles. Il tient un carnet où il note ses observations astronomiques et les manœuvres du jour, dans une écriture fine et précise. L’équipage l’appelle parfois “l’Horloger du Ciel”. Il parle peu aux marins, mais commence à gagner leur respect en anticipant les changements de vent. Il rêve de devenir capitaine un jour, mais sans faire d’éclats.
8. Nicolas LE RENARD, la Mouche, gabier, 28 ans, natif d’Étaples, enrôlé très jeune
Petit, nerveux, agile comme un singe dans les haubans, il connaît les voiles, les nœuds, les hauteurs. IL rit tout le temps même sous la pluie ou dans les manœuvres de nuit. Il conserve tout un tas d’objet dans son sac de jute : dents de requin, perles, dés, bouts de corde…
Les six premières semaines, la patrouille n’a rien à signaler : c’est presque de la routine ! Jusqu’à ce 24 juin 1836, om les vigies signalent une voile basse longeant discrètement la côte, entre la pointe des sept Frères et celle de Asra.

Le Capitaine MONTFORT ordonne de réduire la voilure et d’observer à distance. Après une heure de filature, le pavillon du navire suspect, le Madrilène, un brick espagnol, demeure toujours invisible.
Le Père Fournaise fait mettre les canonniers en place et tout l’équipage est sur le qui-vive. Le signal de reconnaissance étant ignoré, Louison arme les canons de proue. Un tir de semonce est lancer à bâbord du brick : le navire prend la fuite.
Le Capitaine fait mettre à l’eau un canon de six hommes dirigés par l’enseigne de vaisseau, le Moine. Le Madrilène est intercepté. A son bord, pas de pavillon, des armes dissimulées, et une cargaison de poudre noire et de tissus non déclarée.
Le brick est saisi au nom du roi et l’équipage emmené et remis aux autorités d’Alger.
Le Capitaine a noté dans son journal de bord : « L’équipage, sous les ordres du Père Fournaise, a été digne et prêts pour la manœuvre. La poudre a donné sans aucune victime. La gloire de la France est intacte !«
Le 3 août 1836, le Vengeur axonais reçoit les félicitations du contre-amiral de l'escadre pour son exploit.
Ce navire, le Vengeur axonais est issu tout droit de mon imagination. Quel bonheur que cette création !…
Sources
– Photo d’un Vengeur, ici, Le Marseillois,
– Image de l’équipage : ChatGPT.com
– Carte : UmapOpenstreet