L'hiver est une saison peu propice aux activités extérieures…
Le père de Mariette est charpentier-couvreur, ce n’est donc pas en hiver qu’il a le plus de travail ! Il s’occupe avec la vannerie : paniers de toutes sortes, malles, etc. Mais, aujourd’hui, ce qui préoccupe Sébastien, c’est ce qu’essaie de faire le marquis de Cramayel : s’approprier un chemin communal.
Autour de la table, ses amis, Jean et François PATIN, Barthélémy POULIGNY, beau-frère des deux précédents, et Jean QUIHOU échangent avec animation :
- Comment ose-t-il s’approprier un chemin ?
- Nous n’avons pas fait la révolution pour qu’un b…d de noble nous vole nos terres !
- Oui, mais il est ami avec l’Empereur…
- Et alors ?…
- Le maire et ses acolytes ne sont pas très violents à son encontre !
- Rappelle-toi, ils étaient très amis lorsqu’il a fallu dénoncer notre pauvre curé lors de la messe de l’Assomption en 1793 !
- Alors, que faisons-nous ?
Il faut absolument parler au maire et lui demander de tenir ferme pour que ce chemin reste la propriété de la commune puisqu’il était la propriété de la paroisse !
Ce qui n’est pas simple, c’est que Jean François FONTAINE de CRAMAYEL, marquis, est, outre propriétaire du château et des fermes attenantes, propriétaire des fermes de Chanteloup et de Noisement. Ile st aussi le Seigneur de Cramayel, fidèle de Napoléon 1er depuis la Révolution. L’Empereur et l’Impératrice sont même parrain et marraine de la plus jeune fille du marquis, Napoléone Joséphine. Autant dire que le marquis a de gros appuis politiques, mais, est-ce suffisant pour s’approprier des terres et des chemins ?
Mariette écoute, comme ses frères, mais seul Gabriel a l’air de comprendre ce qu’il se dit. Elle se demande comment un chemin peut appartenir à une seule personne alors que tous ont besoin de l’emprunter. Et puis, comment pourra-t-elle aller au bois des Brossettes, cet été, avec Jeanne et ses amies ?
Et puis, ce marquis, elle ne le connaît pas… Il ne vient, avec sa femme et ses enfants, qu’à la belle saison.
« Dis, maman, pourquoi le marquis qui a tant de terres, de bois et de chemins, pourquoi est-ce qu’il veut aussi le chemin dont papa parle ? » « C’est une affaire de grands, ne t’inquiète pas » lui répond sa maman avec un léger sourire « Nous n’utilisons pas souvent ce chemin, nous, pour aller à la ferme de Chanteloup, nous empruntons celui de Moissy à Chanteloup ! Ce n’est donc pas bien grave si le marquis se l’approprie… »
L’heure tourne, la nuit est tombée. Les amis de Sébastien sont partis et ce dernier s’installe dans le fauteuil près de la cheminée. Il bougonne encore, il en a assez de ces nobles qui ne sont plus nobles depuis la Révolution mais qui agissent toujours comme si rien n’avait changé ! Mariette n’aime pas quand son papa est ainsi, elle craint qu’il se mette en colère contre elle et ses frères…
Mais non, dès qu’il passe à table, il est serein et parle des activités qui l’attendent demain. La neige continue de tomber, il va cependant devoir aller réparer la toiture du père BOULVERT, elle a une fuite et avec ce froid, le risque pourrait être encore plus important. Quant à Mariette, elle espère pouvoir retrouver Jeanne et aller courir dans la neige jusqu’au ru où elle aime voir l’eau qui a gelé…