
Brasserie « Le Terminus » – Boulogne-sur-Seine – Collection Antequam
La table est là, en U, ce mardi 3 mars 1897, dans cette brasserie du Terminus, à Boulogne-Billancourt. Etrangement, d’un côté du U, cela parle anglais, de l’autre, c’est un mélange d’allemand et d’alsacien !
Du côté du marié, Charles Georges DEVILLERS sont présents :
– sa grand-mère, Emelie BRACONNIER, veuve DEVILLERS, et son époux Pierre CHOCAT dit HAMILTON,
– son père Paul et son frère Maurice, 13 ans,
– sa grand-tante, Marguerite BRACONNIER, et son époux Jean Eugène ROBERT-HOUDIN,
– une cousine éloignée, Marie Henriette Joséphine BRACONNIER, de Bruxelles, Belgique,
– sa tante et marraine, Clara WELCH, et son époux Edmond GIRARDET accompagnés de leurs trois filles, Mabel, Gertrude et Alice, de Southampton, Angleterre.
– son oncle et parrain, Louis WELCH et son épouse Elizabeth PHEBY, de Londres, Angleterre.
Du côté de la mariée, Rose Marie Jeanne HICKENBICK sont présents
– Marie Madeleine WEIBEL, veuve HICKENBICK, sa mère,
– son oncle et parrain, François HICKENBICK et son épouse Marie Agathe GROSS,
– son cousin Isidore HICKENBICK et sa femme Josephina ZUSATZ, et leur fille Maria Josephina, de Gundolsheim, Alsace,
– sa marraine, Marie Anne CLEMENTZ, de Wittisheim, Alsace.
Personne ne se mélange ! Les deux clans sont face à face ! Tout les sépare ! Les deux mariés sont un peu tendus malgré la cérémonie qui vient d’avoir lieu… Charles, un peu coureur, se sent coincé ! Rose a réussi à épouser son amoureux : il lui a tout de même déjà fait trois enfants. Un seul est en vie aujourd’hui, mais tout de même !
La famille du marié est très à l’aise dans ses beaux habits de fête. L’illusionniste s’exprime en anglais avec une aisance toute naturelle. Edmond GIRARDET parle le français, son père n’est-il pas suisse… Ces personnes-là vivent dans un monde riche : illusionniste, imprimeur, marchand, assureur, …
La famille de la mariée est gauche dans ses beaux habits du dimanche. François HICKENBICK est tisserand, et ses autres parents sont du monde agricoles : ils travaillent la terre. Ils sont venus à Paris pour sortir, mais ils ne pensent qu’à leurs bêtes, qu’à leurs champs. Ils sont trop loin de chez eux.
Le repas ne s’éternise pas : Pierre CHOCAT et Jean Eugène ROBERT-HOUDIN ont un spectacle à assurer, Les WELCH doivent prendre train pour Le Havre : ils repartent par bateau dès demain pour Southampton… Les familles HICKENBICK et CLEMENTZ doivent aller à la gare de l’Est pour prendre leur train et rentrer dans leur ferme…
« Tut mir leid, ist alles in Ordnung ? » « Ja, ja, ich habe geträumt » Les touristes allemands m’ont sortie de ma torpeur.
Je me lève et poursuis mon chemin. Etrange ce mariage… Mes parents ont dû vivre le même : les Parisiens face aux Axonais. Deux mondes totalement opposés !…