Dans la presse, les faits divers sont légion. Celui-ci se déroule le 18 décembre 1892, à Paris !
La victime
Jules Augustin JONARD, 31 ans, est sergent, gardien de la Paix à Paris. Il est l’époux de Euphrasie BRUGIÈRES, 27 ans, couturière. Mariés depuis huit ans, ils sont les heureux parents de Marie Louise Euphrasine, 5 ans au moment des faits.
Le couple réside 3 rue de la Charbonnière, dans le 18ème arrondissement, mais, sont-ils vraiment heureux ?
Le meurtrier
Paul POLINAS,32 ans, concierge et agent de bureau de postes, est marié, depuis 7 ans, à Marie Germaine PESCHARD, 27 ans, concierge, au 76 de la rue du Cardinal Lemoine. Ils sont parents de Isabelle Marguerite, 6 ans.
Les faits
Quelques temps avant le drame, Euphrasie, que tous appellent Mme Louise, fait la connaissance de Paul POLINAS, 32 ans, concierge, dans un café de la rue Jean-Jacques Rousseau.
Leur relation ne reste pas platonique et les amants prennent l’habitude de se rencontrer à l’hôtel, ou au domicile conjugal de Euphrasie, alors que son époux est de service.
Si le mari ne sait pas qu’il est cocu, l’épouse POLINAS, très jalouse, apprend les infidélités de son mari et décide de le suivre. Mais, à peine arrivé au 3 de la rue Charbonnière, Paul ayant sûrement remarqué que son épouse était sur ses talons, entre dans l’immeuble et ressort aussitôt. Sa femme l’interroge et il répond « qu’il est venu voir un sieur Verdun et que, visiblement, l’adresse est erroné car aucun Verdun n’habite l’immeuble ! »
Si Marie Germaine semble s’accommoder de la réponse, elle n’en reste pas moins vigilante et observatrice. Le 14 décembre 1892, brossant le pardessus de son mari, elle découvre une lettre adressée à son mari et dont l’écriture sur l’enveloppe lui est inconnue.
En bonne épouse jalouse et fureteuse, elle lit la missive. Une certaine Louise JONARD qui « s’excuse de ne pas avoir honoré le rendez-vous de la veille, son mari étant malade et cloué au lit, elle n’avait pu sortir ! » Marie Germaine décide de retourner au 3 rue de la Charbonnière pour en avoir le cœur net. Elle frappe à la porte, le gardien de la Paix lui ouvre et elle lui annonce tout de go qu’il est cocu en lui mettant la lettre sous le nez. Jules Augustin lit le mot et lui dit « qu’il en fera son affaire« .
Paul, l’amant, ignorant que sa relation avec Euphrasie n’est plus un secret pour leurs époux respectifs, se présente 3 rue Charbonnière le 17 décembre en fin d’après-midi. Quelle surprise lorsque l’amant se retrouve devant le mari qui a ouvert la porte !
L’amant balbutie quelques mots et s’enfuit poursuivi par le mari. L’altercation est suivie d’une courte lutte et Jules, devant les badauds attroupés, ramasse le chapeau de son rival et lui crie « Si vous n’êtes pas un lâche, vous viendrez le prendre chez moi ! » Lâcheté ou pas, l’amant ne se présente pas. Le gardien de la paix, agacé par l’attente, décide de se rendre directement chez le concierge. Il est 21h30 lorsqu’il arrive et demande à la loge où réside la famille POLINAS. Evidemment, il s’aperçoit que POLINAS est le concierge. Médusé, ce dernier se lève, saisi son revolver et fait feu. La balle touche le gardien de la Paix dans la région du cœur et cette blessure sera fatale : il s’éteint quelques heures plus tard à l’Hôpital de la Pitié.
Le meurtrier, tout de suite arrêté et interrogé, déclare qu’il n’avait pas eu l’intention de tuer JONARD, qu’il s’était contenté de le menacer avec son revolver et que le coup était partit involontairement. Mais la préméditation est établie et il est écroué au Dépôt.
Le prologue
La maîtresse, Euphrasie BRUGIÈRES a mis au monde un fils, René, le 26 décembre 1893, décédé le 12 janvier suivant. Sa fille ainée, Marie Louise Euphrasine, a épousé, son cousin germain, Charles Jules Alfred JONARD, le 29 février 1908.
L’amant a déménagé dans un autre quartier de Paris. Sa fille, Isabelle Marguerite, a épousé Paul Alfred MULLER, le 6 décembre 1906 à Paris.
Paul POLINAS, enfant abandonné des hospices d'Angers, est décédé à Seris, dans le Loir-et-Cher, le 21 avril 1933. Quant à Euphrasie BRUGIÈRES, aucune information complémentaire n'a été trouvée sur le net…
Sources
– RetroNews – Le journal « Le Petit Parisien », édition du 19 décembre 1892, page 1/4